Par Alexandra Vakaloulis.
Le 27 novembre dernier, la Table de quartier Hochelaga-Maisonneuve a célébré ses 30 ans d’existence en réunissant près d’une centaine de personnes issues de toutes les périodes de son histoire. Des citoyen·nes engagé·es, des partenaires communautaires, des membres anciens et nouveaux avaient répondu à l’invitation pour souligner trois décennies d’action collective. L’ambiance était chaleureuse, festive, profondément ancrée dans l’esprit du quartier. Un numéro de cirque est même venu ajouter une touche de poésie à cette célébration, rappelant que même dans un contexte de luttes sociales, la créativité et la joie continuent d’occuper une place essentielle ! Ce rassemblement a également été le cadre idéal pour dévoiler leur nouvelle identité visuelle, symbole d’évolution et dynamisme! Mais ce n’était pas qu’un anniversaire : pour l’équipe de la table, elle représentait un moment pour se rassembler, honorer les parcours individuels et collectifs, et constater la force tranquille qui traverse Hochelaga-Maisonneuve depuis trente ans. Pour Jonathan Alarie, directeur de la table, cette journée témoignait surtout de quelque chose de précieux, presque unique: l’extraordinaire capacité de ce quartier à se mobiliser.
Trente ans de luttes collectives qui ont façonné le quartier
Pour comprendre la signification de cet anniversaire, il faut revenir au début de l’histoire. La table de quartier a pris naissance dans un contexte économique difficile et c’est dans ce terreau qu’elle s’est constituée comme un espace de mobilisation où les résident·e·s pouvaient unir leurs forces. Un moment marquant est survenu en 2012, lorsque les différentes tables sectorielles se sont unies pour rejoindre la table de quartier. Cette convergence a donné une impulsion nouvelle en créant une structure forte et capable de porter des luttes plus larges. A titre d’exemple, la campagne Engagez-vous pour le communautaire, a eu des effets fédérateurs à l’échelle locale pour ce quartier et illustre bien la force de ces mobilisations collectives.
Trente ans de transformations communautaires
Trente ans plus tard, la table de quartier d’Hochelaga-Maisonneuve est l’un des moteurs les plus importants de la vie communautaire locale. Le constat actuel est clair : le membership n’a jamais été aussi élevé ! Les comités fonctionnent, les gens s’impliquent et les assemblées débordent au point où la salle n’arrive plus à contenir tout le monde…un beau problème !
La table s’est aussi rapprochée des mouvements citoyens. Ce rapprochement a transformé la dynamique sociale du quartier. On y voit émerger un réflexe de se réunir; autour d’un café citoyen par exemple; pour réfléchir ensemble, sortir de la bulle communautaire et inclure davantage les initiatives citoyennes dans l’action locale. Ces espaces permettent au quartier d’exprimer ses préoccupations, mais aussi de porter des réflexions plus profondes, notamment sur l’environnement…des enjeux qui montent en importance. Aussi, les relations avec l’arrondissement se sont consolidées, notamment autour du plan de quartier lié au logement. Deux employés à temps plein travaillent désormais sur cette question, un indicateur clair de son importance stratégique. Et les résultats commencent déjà à se faire sentir dans le quartier !
Cette vitalité est d’autant plus remarquable que pour différentes raisons, la table a connu quelques années plus difficiles, mais celles-ci semblent résolument derrière elle. Le travail mené depuis a été considérable. Aujourd’hui, cette reconstruction porte ses fruits et l’image de cette dernière a été modernisée, sa présence sur les réseaux sociaux s’est amplifiée et la population s’y reconnait à nouveau.
Construire l’avenir après trente ans
Les défis demeurent nombreux, et certains sont particulièrement urgents. L’itinérance, dont nous parlons dans l’épisode 4 d’Esprit de quartier, et le logement constituent les enjeux les plus pressants dans Hochelaga-Maisonneuve. Ils sont profondément liés. La table travaille donc à structurer une logique d’intervention cohérente qui relie hébergement, alimentation, défense des droits et soutien de proximité.
Parallèlement, un travail important est en cours pour comprendre le potentiel du quartier. Le nouveau portrait de quartier permet d’évaluer l’état du logement existant et d’identifier les terrains et bâtiments institutionnels pouvant accueillir de nouveaux projets communautaires. A titre d’exemple, le futur départ du CHSLD, prévu dans deux ans, ouvre une question centrale : comment faire en sorte que cet espace revienne à la communauté ? Des partenariats avec des acteurs comme Bâtir son quartier sont déjà en réflexion pour imaginer de nouvelles avenues de développement.
L’extraordinaire solidarité d’Hochelaga Maisonneuve
Si Jonathan Alarie devait retenir un point essentiel des 30 années de la table de quartier, ce ne serait ni une lutte en particulier ni un projet précis. Ce serait la solidarité…tout simplement. Une solidarité rare, vivante, presque surprenante par son ampleur. Dans Hochelaga-Maisonneuve, les membres se mobilisent de manière hors du commun. Lors de la fête de la famille par exemple, quarante groupes s’impliquent spontanément et l’événement s’auto organise tant la participation est intense. Cette mobilisation dépasse largement la logique d’urgence pour s’inscrire dans un véritable mouvement collectif. Les mouvements citoyens nourrissent cette dynamique. Ils apportent des réflexions nouvelles, poussent le quartier à penser à des changements plus systémiques, et enrichissent une vision commune de ce que peut devenir Hochelaga-Maisonneuve. Pour le directeur, cette force collective est le cœur vibrant du quartier et la raison pour laquelle la table peut envisager l’avenir avec confiance.
30 après sa création, la table de quartier d’Hochelaga-Maisonneuve continue de démontrer qu’un quartier peut changer lorsqu’il agit ensemble. Grâce à la mobilisation exceptionnelle de ses membres, à la créativité de ses partenaires et à la solidarité qui définit son quartier, la table se tourne vers les prochaines années avec une conviction simple : un quartier peut encore se transformer quand les gens qui l’habitent décident de le faire ensemble. Alors, on vous souhaite au moins 30 ans de plus !
🎙️Écoutez Jonathan Alarie nous parler de démocratie locale, qui prend plusieurs formes dans nos quartiers et qui se déploie bien au-delà des campagnes électorales.
